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Titre du blog : Cyber ♡ Cat
Auteur : cybercat
Date de création : 06-03-2020
 
posté le 27-06-2021 à 11:27:00

Ce qu'il se passe au Myanmar (Birmanie)

  Cette fois ci ce n'est pas un billet de journal personnel comme d'habitude.

 

  J'ai été touchée par l'histoire de cette fille birmane qui est devenue par hasard un leader révolutionnaire dans son pays alors qu'elle était une actrice, makeup artiste d'effets spéciaux, mannequin et youtubeuse lifestyle.

 

  J'ai traduit son interview en français parce que l'anglais peut être un frein pour ceux qui ont du mal en anglais.

 

 

 

 

  Vous pouvez écouter l'interiview en anglais en cliquant sur l'image.

 

  Voici la traduction en français:

 

 Bonjour tout le monde, c'est Stephen de Asian Boss

 

Pouvez vous imaginer vous réveiller et découvrir qu'un coup d'Etat militaire a renversé votre gouvernement élu démocratiquement, au milieu d'une pandémie ?

C'est exactement ce qui est arrivé au Myanmar (en Birmanie) le 2 février 2021.

 

Et pendant que vous n'en avez peut être pas entendu parler dans les médias mainstream, la situation sur le terrain n'a fait qu'empirer. 

A quel point est ce grave ? Demandons à Yuri, une célébrité au Myanmar qui est actuellement blacklistée par l'armée parce qu'elle essaye d'alerter sur ce qui se passe au Myanmar. 

 

Yuri a accepté de s'asseoir avec nous pour partager son histoire incroyable de comment elle s'est évadée du Myanmar. Si vous pensez que les histoire des détecteurs Nord Coréen sont folles, regardez ça.

 

_ Merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui.

 

_ Merci à vous de m'avoir invité.

 

_ Nous sommes sensibles au fait que l'anglais n'est pas votre langue maternelle. Ne vous sentez pas nerveuse à propos d'être capable de parler anglais parfaitement. Je pense que les gens vont bien vous comprendre. 

 

_ Je suis désolée pour mon anglais. Je suis très nerveuse maintenant parce que je dois m'exprimer sur mon pays. Merci d'être compréhensif. 

 

_ Vous êtes du Myanmar,

 

_ Oui

 

_ et vous vous êtes enfuie du Myanmar. Nous voulons vraiment entendre votre histoire.

 

_ Oui, je vais me présenter. Je m'appelle Hanna Yuri. Je travaille comme mannequin professionnelle et actrice en Asie. Et je travaille aussi comme makeup artiste. 

 

_ Ce que les gens dans le monde comprennent ce qui se passe au Myanmar maintenant c'est qu'il y a eu un coup d’État militaire et que beaucoup de gens protestent. Mais vous avez la connaissance de ce qui se passe sur place depuis le tout début.

 

_ L'année passée nous étions en difficulté avec le Covid 19. Nous avons été confinés pendant presque un an. Nous pensions que nous allions voir des jours meilleurs en 2021 mais ce coup d’État militaire est arrivé en 2021. Nous n'avons jamais voulu cela. Les jeunes, moi incluse, les citoyens Myanmar, nous n'étions pas réellement intéressés par la politique jusqu'à présent. Mais le premier février nous avons pensé que c'était une réelle injustice qui arrivait à notre pays. Donc nous avons commencé à protester contre le coup d’État militaire. J'ai commencé à m'exprimer à propos de ce qui se passait au Myanmar sur mes réseaux sociaux à partir du premier février. J'ai participé aux mouvements de protestation et j'ai essayé d'aider les manifestants. Avant le coup d'Etat nous avions déjà entendu des rumeurs disant que le parti militaire n'était pas content des résultats des élections et ils essayaient d'accuser le gouvernement d'avoir fraudé les résultats. Ils ont dit que c'était la raison pour laquelle ils devaient prendre le contrôle de la situation en faisant un coup d’État.

 

_ Avant que le coup d’État ne change tout, comment était votre vie ?   

 

_ Honnêtement j'étais un peu déprimée par la situation avec le Covid. Nous étions confinés, je pensais que quand nous serions vaccinés en 2021 nous pourrions voyager à nouveau et que je pourrais avoir plus de travail dans le futur. J'avais beaucoup de projets. Le gouvernement avait prévu que nous soyons tous vaccinés. Mais le coup d’État est arrivé et à mit tout sans dessus dessous. Nous n'avions plus de futur, avions abandonné tous nos rêves et sommes devenus des activistes. J'ai tenté de m'exprimer pour mon pays et de demander de l'aide en utilisant mon influence sur les réseaux sociaux. J'ai beaucoup de follower sur mes réseaux sociaux donc je peux utiliser mon exposition pour parler pour mon pays. 

 

_ Le jour où le coup d’État est arrivé, qu'avez vous vu ? 

 

_ En regardant mon téléphone une de mes amies m'avait envoyé un message me disant qu'ils détenaient déjà Aung San Suu Kyi et les autres leaders et que c'était un coup d’État militaire qui venait de se produire. J'étais très choquée parce que nous ne pensions pas qu'un tel cauchemar puisse se produire en 2021. J'ai essayé d'appeler mes parents mais il n'y avait plus de réseau.

 

_ Mais alors comment votre amie vous a envoyé un texto ?

 

_ Avant qu'ils ne coupent le réseau. 

 

_ Votre amie vous a prévenu et juste après les lignes ont été coupées ?

 

_ Oui. Dès que j'ai vu le message j'ai essayé d'appeler mes parents. Mais l'appel ne passait pas alors j'ai commencé à pleurer. Je suis monté à l'étage où mes sœurs étaient encore en train de dormir. J'ai essayé de les réveiller. Je suis sortie dans la rue en tenant mon téléphone, sans même avoir mit des chaussures, en espérant trouver du réseau pour joindre mes parents. Mes parents vivent dans une autre ville. Avec mes sœurs nous vivions à Yangon. J'étais très inquiète de ne pas pouvoir joindre mes parents. Je pensais que la guerre allait commencer bientôt et que je ne reverrais jamais plus mes parents. J'étais très inquiète et effrayée. Ce jour là, après deux heures, l'armée a ré-ouvert internet. Ils ont dit que à cause de la situation du pays et de la fraude des élections ils avaient du intervenir pour restaurer l'ordre. 

 

_ Quand est ce que les gens ont commencé à protester ?

 

_ Quatre jours plus tard. Ils ont coupé internet et le téléphone à nouveau. Nous ne pouvions plus nous contacter entre nous mais tout le monde à reçu des messages comme « Aung San Suu Kyi a été libérée », ce genre de fake news se propageaient. Nous ne pouvions même pas aller sur internet donc nous étions dans la confusion. C'est ce qui a fait que tout le monde a commencé à sortir dans la rue et a protester. Je me souviens d'avoir participé à une manifestation : j'ai vu les gens protester dans la rue et j'ai pensé que je devais aller dehors en tant que célébrité pour que les gens voient que même une célébrité comme moi était dehors pour protester pour notre pays. Je voulais montrer cela et j'ai commencé à participer au mouvement de protestation aux cotés des citoyens Myanmar et de mes amis. 

 

_ Est ce que l'armée autorise les gens à protester de cette façon ?

 

_ Non, évidemment ils n'autorisent pas les gens à protester. Ils étaient particulièrement en colère contre les célébrités qui rejoignaient les manifestations. C'est pourquoi les manifestants devaient porter des casques parce que les militaires pouvaient leur tirer dans la tête. Même quand je sortais simplement de chez moi je savais qu'on pouvait me tirer dessus par derrière ou par les côtés et je ne me sentais pas en sécurité. Mais je voulais quand même toujours manifester. L'armée essayait de tirer sur les manifestants. 

 

_ Avez vous vu quelqu'un être tué ?

 

_ J'ai vu un homme être touché à la jambe. Sa jambe était entièrement détruite. Il n'avait plus de jambe. 

 

_ Ils avaient soufflé sa jambe.

 

_ Oui, et nous avons appelé une ambulance à l'aide. Mais les militaires ont aussi tiré sur l'ambulance. Alors personne n'a pu le sauver et il a perdu sa jambe. J'étais à côté de lui et je tremblais. Même si je travaille comme maquilleuse d'effets spéciaux, que j'ai travaillé avec beaucoup de faux sang pour créer des effet spéciaux, je n'avais jamais vu quelqu'un être blessé par balle. L'odeur du sang … c'était traumatisant. Je n'arrêtais pas de trembler. Nous n'avions pas d'armes. Nous n'avions rien. Nous portions juste des pancartes en papier pour la liberté et la démocratie et des photos de Aung San Suu Kyi. Et ils ont commencé à tirer. 

 

_ Juste comme ça ?

 

_ Oui, ils ont commencé à tirer en visant la tête. 

 

_ Tout le monde ou juste une personne pour faire un exemple ?

 

_ Pas un exemple, ils utilisaient des armes automatiques pour tirer sur les manifestants.

 

_ Vraiment ?

 

_ Oui, il y a environ deux mois, à Yangon, 160 personnes sont mortes en une journée. Ils ont tiré avec des armes automatiques et personne ne pouvait s'échapper. Aucune ambulance ne pouvait venir. Les manifestants étaient mourant dans la rue, avec leur blessures, leur cerveau éclaboussés sur le bitume. On pouvait voir aussi des intestins répandus par terre. Nous avons tout filmé et photographié et posté sur Twitter. 

 

_ Après cette expérience traumatisante,  est ce que vous vous êtes dit que vous n'alliez plus aller manifester parce que c'était trop dangereux ? 

 

_ D'autres gens avaient déjà sacrifié leurs vies pour la démocratie. Si nous restions chez nous parce que nous avions peur nous n'obtiendront jamais la démocratie. Nous devions tous participer à l'effort pour atteindre la démocratie, pour les gens qui ont perdu leurs vies et ont sacrifié leurs vies. 

 

_ Avec les informations que vous avez maintenant, vous pensez que combien de gens ont déjà été tués ?

 

_ Depuis le coups d’État militaire plus de 800 personnes ont déjà été tuées par l'armée. Mais dans les régions rurales il y a des personnes disparues sans laisser de traces parce que ils tuent les gens et détruisent les corps. Donc nous n'avons pas d'informations. Dans certaines régions rurales il n'y a pas internet, nous n'avons pas de moyens de communication. Beaucoup de gens sont morts et ils ont déjà tué beaucoup dans les zones rurales. Officiellement c'est environ 800

 

_ Mais c'est plus que 800. Et il y a des vidéos et des photos de l'armée tuant des gens avec des armes automatiques et tout ça ?

 

_ Oui, nous avons ça, et nous l'avons posté sur les réseaux sociaux. En ce qui me concerne les gens pensent que je parle de ça parce que je suis en lieu sûr. Ce n'est pas ça. Même quand j'étais dans une situation dangereuse j'ai donné des interviews avec la BBC et d'autres médias internationaux à propos de ce qui se passe au Myanmar. C'est très important, nous devons montrer que l'armée est en train de faire des choses horribles aux citoyens Myanmars. C'est presque un génocide.

 

_ Quand avez vous décidé que ce n'était pas sûr pour vous de rester au Myanmar ?

 

_ J'ai essayé de déménager successivement pour me cacher. Beaucoup de gens savaient où je vivais parce que mes fans m'envoyaient des cadeaux. C'est facile pour l'armée de trouver l'adresse des célébrités. J'ai déménagé pour la première fois la deuxième semaine de février parce que quand les militaires ont annoncé qu'ils avaient listé les célébrités qui s'exprimaient à propos de l'injustice du coup d’État. J'étais la numéro 5

 

_ Donc vous étiez la numéro 5 sur leur liste noire. Comment est ce que vous avez découvert que vous étiez cinquième sur la liste ? Est ce qu'ils l'ont publiquement annoncé ?

 

_ Oui, publiquement. C'était partout sur internet. Ils transmettaient le lien de mon compte Facebook et le nombre de posts révolutionnaires que j'avais fait.

 

_ Qu'est ce que être sur cette liste impliquait ? Si ils vous trouvaient qu'est ce qui allait vous arriver ?

 

_ Cela voulait dire que j'allais être emprisonnée pour de nombreuses années ou toute ma vie. Ils peuvent vous arrêter pour avoir enfreint le code pénal 505 et après ajouter beaucoup de charges contre vous. Je pense que j'aurais pu passer ma vie en prison ou y mourir. 

 

_ Et une fois que vous avez vu votre nom était sur la liste,  c'est à ce moment là que vous avez décidé de quitter le Myanmar ? 

 

_ Je ne savais pas encore que j'étais sur la liste, j'étais en train de manifester dans la rue quand ma professeur (de coréen) m'a téléphoné et m'a demandé où j'étais. J'ai essayé de renter tout de suite chez moi car mon nom était sur la liste. Ma professeur de coréen était vraiment inquiète, elle savait que je planifiais d'étudier en Corée. Depuis décembre 2020 j'étais en train de me préparer pour partir étudier en Corée pour février. Mais à cause du coup d’État je ne pouvais plus me focaliser sur les études et j'ai pensé que je devais rester au Myanmar. 

 

_ Alors vous seriez venu en Corée de toutes façons, mais vous l'avez reporté ? Quand avez vous décidé qu'il était temps pour vous de partir ?

 

_ En avril. Un ami qui était également une célébrité a été arrêté. Ils ont commencé à arrêter les célébrités. La liste avait été postée pendant la seconde semaine de février alors nous pensions qu'ils n'étaient pas vraiment sérieux à propos d'arrêter les célébrités, comme si c'était du bluff. 

 

_ Mais ils sont passé à l'action

 

_ Ils ont commencé les arrestations et j'ai pensé que je n'étais plus en sécurité et que si je restais au Myanmar je pouvais mettre la vie de d'autres gens en danger juste parce qu'ils étaient dans mon entourage. J'ai décidé de risquer ma vie pour m'échapper en Corée. Il y avait des espions dans le voisinage et parmi les célébrités. J'ai su que l'armée était sur le point de me trouver alors je devais arrêter de manifester.  

 

_ Comment saviez vous que c'était des espions ?

 

_ Nous ne savions pas pour sûr. Ils ont l'air d'agir amicalement mais ils essayent d'obtenir des informations à propos des manifestants, comme savoir où on passera la nuit. Comme ça l'armée peut venir et nous arrêter. Ils arrêtent des gens toutes les nuits. 

 

_ Ils vont dans leurs maisons ?

 

_ Oui, ils font des raids dans les maisons. Si ils ne trouvent pas ceux qu'ils cherchent ils arrêtent les autre membres de la famille. Ils arrêtent les gens la nuit et retournent les corps le matin. Nous ne pouvons même pas imaginer comment ils torturent la personne à mort toute la nuit. Ils prennent des organes et recousent. 

 

_ Les corps sont ramenés au matin avec leurs organes manquants ?

 

_ Oui, c'est la vérité. C'est très difficile pour les familles. Nous devons faire face à ça presque tous les jours. Ils ont tué les membre du gouvernement et les gens qui se sont joins à la désobéissance civile. 

 

_ Quand vous avez décidé de vous enfuir c'était en avril, c'est ça.

 

_ Oui, avril. 

 

_ Donc vous avez manifesté en vous cachant pendant deux mois. Comment était votre santé à ce moment ?

 

_ Tout les matins je me réveillais en pleurant et je dormais en pleurant. C'était devenu ma routine. Je ne pouvais pas manger, pas dormir. J'avais commencé à me sentir très faible. J'étais très traumatisée. Si j'entendais le moindre bruit en dormant je pensais que c'était l'armée qui venait m'arrêter. Alors j'essayais de m'échapper par la porte de derrière. Presque tous les jours l'armée venait dans ma rue et tirait dans les fenêtres. Si quelqu'un allumait la lumière dans la soirée ils tiraient sur cette maison.  Nous ne pouvions plus allumer les lumières. On restait dans le noir, on mangeait dans le noir. Ils ne faisaient pas que tirer aux fenêtres, ils pouvaient aussi lancer des bombes à l'intérieur des maison. Ils essayaient d'effrayer les gens pour qu'ils arrêtent de manifester. Ils pouvaient tirer sans raison sur une personne marchant dans la rue. Alors nous étions effrayés d'aller dehors et nous restions dans le noir. Il y avait un couvre feu de 8 heures du soir à 4 heures du matin. Mais même si on sortait à 6 heures du matin on pouvait être tué. 

 

_ Avec votre santé qui faiblissait vous deveniez sûrement paranoïaque. Quand vous avez décidé de partir quelle a été la première étape ?

 

_ Pour les citoyens Myanmar il faut un test de Covid fait 72 heures avant pour prendre l'avion pour la Corée. Dans mon cas je ne savais pas où me faire tester pour le Covid parce que nous pouvions seulement faire le test dans un hôpital militaire. Mais je ne pouvais pas aller à l'hôpital militaire dans mon cas. Je ne pouvais pas montrer mon identité. Ils pouvaient être capable de m'identifier en reconnaissant mon visage. J'ai donc demandé de l'aide dans un hôpital privé sans utiliser mon vrai nom. J'ai juste dit que j'étais étudiante et j'ai eu la chance de réussir à être testée pour le Covid dans cet hôpital. Sur le chemin de l'hôpital les militaires ont arrêté ma voiture. Ils ont checké mon téléphone et mon Facebook. Nous savions déjà qu'ils faisaient ça alors nous avions supprimé nos photos et ouvert des faux comptes Facebook sur lequel nous postions combien nous aimions l'armée du Myanmar pour montrer que nous étions de leur côté. La nuit avant que je m'échappe en Corée mon avion partait à 7 heures du matin et je devais partir de chez moi vers 4 heures du matin. Je n'avais pas pu dormir et je n'avais pas arrêté de penser. Je pensais « si je suis arrêtée à l'aéroport c'est mon destin. » C'est que mon destin est de finir en prison ou d'être tuée. C'est le plan de Dieu. « Alors je dois juste suivre le plan de Dieu ». Je pensais de cette façon en quittant ma maison à 4 heures du matin. J'ai rencontré des soldats et la police plusieurs fois sur le chemin de l'aéroport. Par chance ils ne m'ont pas reconnu parce que je ne pouvais plus dormir ni manger. Avant d'arriver en Corée j'ai du me cacher dans beaucoup d'endroits, je suis restée dans des hangars, j'ai vécu dans des conditions difficiles, ainsi mon visage était devenu si émacié qu'ils ne pouvaient même pas me reconnaître. J'ai été très chanceuse. 

 

_ Tout s'est bien passé une fois que vous aviez atteint l'aéroport ?

 

_ Avant l'embarquement, ils m'ont demandé d'enlever mon manteau et m'ont fouillé ainsi que mes bagages et mon téléphone. J'avais tout supprimé sur mon téléphone. Je n'avais pas une seule photo de moi, si ils avaient vu une photo ils auraient reconnu que j'étais Hanna Yuri. Alors j'avais tout supprimé pour qu'ils n'aient pas d'indices sur mon identité parce que mon nom et ma date de naissance, tout sur mon passeport est différent de mon identité publique. 

 

_ Une fois que l'avion a décollé, qu'avez vous ressenti ?

 

_ Quand j'ai embarqué j'ai vu des soldats et la police entrer dans l'avion. J'ai pensé qu'ils venaient m'arrêter. Mais ce n'était pas ça. C'était une famille de militaires qui était assise juste en face de moi. Alors même pendant que l'agent de bords était en train de remplir les formulaires pour nous je ne pouvais pas enlever mon masque et mon chapeau. Même pour manger dans l'avion. Je pensais qu'ils pourraient me voir et j'avais peur. 

 

_ C'est fou.

 

_ Oui. Même si j'avais très faim. Je n'avais pas pu manger avant de partir parce que j'étais très nerveuse. Même une fois dans l'avion je ne pouvais pas me détendre parce qu'ils étaient juste devant. J'essayais de cacher mon visage avec mon chapeau. 

 

_ Et ils ne vous on pas reconnu ?

 

_ Non. Il n'y avait pas beaucoup de citoyens Myanmars dans l'avion. Nous devions remplir les formulaires alors l'agent de bord était venu nous demander si on était Myanmar. J'étais très effrayée, je tremblais. Assis à côté de moi il y avait un homme chinois qui ne savait pas comment remplir le formulaire parce qu'il ne savait pas lire l'anglais. Il m'a demandé de l'aide avec une voix forte. J'étais très effrayée. Je n'ai pas pu dormir du tout durant les 6 heures de vol. Quand nous avons atterri à l'aéroport d'Incheon et que j'ai vu la police coréenne j'étais soulagée. J'ai pensé « ça y'est, je me suis échappée ».

 

_ Et vous êtes en Corée maintenant. Qu'avez vous fait une fois en Corée.

 

_ Je suis arrivée ici avec un Visa étudiant. J'avais déjà payé pour deux semestres à mon université. J'ai un Visa de six mois. Je ne sais pas ce que je vais faire après six mois parce que je ne peux pas rentrer dans mon pays sans que nous ayons la démocratie. Peut être que je pourrais demander de l'aide du gouvernement coréen pour un Visa. Si je ne reviens jamais au Myanmar ou si le gouvernement coréen me renvoit au Myanmar je pense que je serais tuée ou je finirais en prison pour le reste de ma vie. Je pense que je devrais trouver un moyen de rester en Corée jusqu'à ce que nous ayons la démocratie. Je ne peux pas rentrer. 

 

_ ça fait environ deux mois que vous êtes partie. Maintenant où en est la situation ? Vous pensez qu'il y a encore beaucoup de gens qui meurent au Myanmar ?

 

_ Oui. Ils tuent des gens tous les jours. Au départ nous ne nous défendions pas, nous ne faisions que manifester. Mais après des mois de brutalités nous avons commencé à former une milice civile. Je pense que la guerre civile est sur le point d'éclater au Myanmar. Mais le problème est que nous n'avons pas d'armes. Nous essayons de nous défendre avec des couteaux contre des armes à feu. C'est impossible. L'armée est en train d'installer des bombes partout au Myanmar et arrête des civils en les accusant de placer des bombes. Kayah et Kachin (des États qui font partis de l'union du Myanmar) ont été bombardés. 

 

_ Nous venons juste d'apprendre que 100 000 personnes sont en train de fuir leurs maisons à Kayah 

 

_ Oui, ils essayent de fuir, Mindat et Kayah sont en état d'urgence. 

 

_ Est ce que vous espérez que la situation peut s'améliorer rapidement ? On dirait que ça peut seulement empirer 

 

_ Même après quatre mois de coup d’État militaire, le général Min Aung Hlaing ne peut toujours pas contrôler la situation. A Myanmar chaque citoyen est contre le coup d’État militaire. Nous n'avons pas d'armes et nous avons peu d'espoir. Mais maintenant nous avons le NUG, le gouvernement de l'unité nationale. Le NUG est notre nouveau gouvernement. Nous avons déjà construit un nouveau gouvernement et nous croyons dans ce nouveau gouvernement. Nous croyons que nous allons nous battre pour reprendre les territoires pris par les militaires avec notre unité et notre esprit qui veut la démocratie. Nous croyons que nous allons gagner cette révolution. C'est pourquoi je ne vais pas demander le statu de réfugiée en Corée. J'aime la Corée mais je veux juste demander l'aide du gouvernement coréen pour me laisser rester en Corée jusqu'à ce que la situation s'améliore parce que ma vie est vraiment en danger. 

 

_ Qu'est ce qui vous manque le plus de votre pays ?

 

_ Honnêtement ma vie me manque. Je crois que je vais pouvoir rentrer vivre mes rêves et mon style de vie préféré. Mais pour le moment je dois rester forte. Je crois que nous allons gagner cette révolution et que je vais rentrer auprès de ma famille. 

 

_ J'imagine que le Myanmar est un beau pays. 

 

_ Oui, mais depuis le coup d’État tout est revenu dix ans en arrière au Myanmar. Nous n'avons plus de transports. L'économie est revenue à zéro. Le peuple Myanmar souffre. Plus de 800 personnes ont sacrifié leurs vies pour un meilleur future pour le Myanmar. 

 

_ Que dites vous aux gens qui font parti de la propagande militaire ? Ils essayent de dire que vous faites cela seulement parce que vous êtes une célébrité et vous voulez devenir plus connue. 

 

_ Je me suis enfuie en Corée et les militaires m'ont accusé d'avoir reçu beaucoup d'argent d'autres pays pour poster sur mes réseaux sociaux, ils m'accusent de travailler dans des boîtes de nuit coréennes pour gagner de l'argent, de faire tout ça pour créer une fausse crise au Myanmar en propageant des fake news. Je pense que je n'ai pas besoin de m'expliquer à propos de ça parce que mes vrais fans au Myanmar savent tous que ce n'est pas vrai et sont de mon côté. Il n'y a que les militaires vivant en Corée qui essayent de propager des fake news. Une fille qui commentait sur mes réseaux sociaux m'a dit que je ferais mieux de me cacher en Corée car elle me ferait du mal si elle me voyait en Corée. Je ne veux pas parler des détails, c'est vraiment mal. 

 

_ Donc vous êtes menacée, même en Corée ?

 

_ Oui, je reçois beaucoup de messages de menaces.

 

_ Des menaces de mort ?

 

_ De la part de militaires, oui. 

 

_ Vous n'êtes pas en sécurité, même en Corée.

 

_ Je pense que la police coréenne va m'aider. Même si je meurs en Corée j'espère que la justice sera révélée parce que c'est en Corée, par au Myanmar. On révélera pourquoi j'ai été tuée et qui m'a tué. 

 

_ Vous êtes juste une jeune fille. D'où vient cette force ? Vous êtes tellement sous pression et vous avez traversé tant de choses. Et vous n'êtes toujours pas en sécurité. Vous recevez des menaces de morts tous les jours. Comment êtes vous capable de continuer. 

 

_ J'aime Aung San Suu Kyi. Je l'aime vraiment. J'aime vraiment son histoire et comment elle a sacrifié sa vie pour le peuple Myanmar. Je n'ai vraiment que faire de la politique et je ne suis pas intéressée par les opinions politiques, je ne peux juste pas rester face à l'injustice. Plus j'ai participé au mouvement de protestation plus j'ai découvert la brutalité de l'armée. J'ai reçu plus de force de la part de ceux qui sont détenus pour parler au nom de la justice et ceux qui ont perdu leur vie pour la démocratie. J'ai pensé que je devais être plus forte. Élever ma voix pour le peuple. 

 

_ Vous n'êtes pas seule. 

 

_ Non, même si je vis ici seule j'ai toujours cru que je faisais ce qui est bien et que le peuple Myanmar est avec moi. Ils croient en moi et on mit leur confiance en moi. Alors je suis devenue plus forte en sentant que je ne suis pas seule. Nous le peuple Myanmar nous sommes forts ensemble.

 

_ Qu'est ce que vous voulez que le monde sache à propos du Myanmar qu'il ne pourrait peut être pas entendre dans les média traditionnels ?

 

_ Tout a été révélé sur internet parce que les myanmars postent tous les jours à propos de ce qui se passe au Myanmar sur Twitter, Instagram et Facebook. Je pense que le monde entier sait ce qui se passe au Myanmar. Les pays qui ne veulent pas prendre parti ne peuvent pas aider le peuple Myanmar. Je veux demander à la communauté internationale, maintenant que nous avons le NUG, notre nouveau gouvernement, s'il vous plaît donnez au NUG. Je veux que le monde entier continu d'entendre ce qui se passe au Myanmar. Qu'il écoute nos voix et donne pour le Myanmar. 

 

_ Personnellement, de quel type de support avez vous besoin ? Vous nous avez dit que vous n'aviez pratiquement rien ici et c'est difficile. Quel forme d'aide recherchez vous ?

 

_ Personnellement je suis venue ici les mains vides. Mais je ne suis pas trop inquiète à propos de ma situation parce que j'ai déjà payé pour mes frais de scolarité. Même si j'ai des problèmes je vais essayer de les résoudre par moi même. Je suis en train d'essayer de candidater pour des aides gouvernementales pour les étudiants. Le gouvernement coréen donne des aides financières aux étudiants myanmars. Ce mois ci j'ai candidaté pour l'aide gouvernementale et j'ai reçu 430 dollars. J'ai donné 270 dollars au Myanmar car les gens au Myanmar ont davantage besoin d'aide que moi. 

 

_ Si vous avez reçu 500 dollars d'aide, déjà ce n'est pas beaucoup, et que vous en avez donné 300, comment allez vous survivre ?

 

_ Honnêtement, je dois payer mon loyer et ma vie en Corée, il est vrai que j'ai vraiment besoin de cet argent pour moi même mais sur mon compte Facebook des citoyens myanmars viennent me demander de l'aide, ils ont besoin d'argent. Ils n'ont pas mangé depuis plusieurs jours. Alors j'ai planifié de donner 30 dollars à dix familles myanmar, avec cet argent ils pourront acheter du riz pour vivre. 

 

_ Nous vous souhaitons évidemment le meilleur. Le monde entier regarde. Merci beaucoup pour avoir partagé votre histoire avec le monde et avec nous. Je suis sûre que beaucoup de gens vont ressentir votre authenticité. Alors gardez l'espoir que les choses vont s'arranger. 

 

_ Merci beaucoup de m'avoir invité et d'avoir fait cet interview. Je m'excuse auprès des gens qui regardent cette vidéo parce que mon anglais est mauvais, ce n'est pas ma langue maternelle et j'étais si nerveuse de parler de la situation de mon pays. S'il vous plaît apportez votre soutient au Myanmar et au peuple myanmar. 

 

 

 

 

 

 

 

 

Commentaires

pouty88 le 28-06-2021 à 06:42:33
bonjour oh lala !

c'est terrible ce qui se passe là bas !

et dire quand France il y en a qui grogne pour un rien ,ils ne savent pas le bonheur qu'ils ont de vivre en France sans tous cette violence des autres pays ...

merci de nous avoir fait découvrir ce message de cette fille .

bonne journée

pouty
banga le 27-06-2021 à 13:14:26
Bonjour Emma merci de cette traduction et de ce témoignage très dramatique de ce qui si déroule en Birmanie,j'en avais entendu parlé , ah là là des drôles de pays qui ont été de toujours sous une dominance étrangère, la France en à fait partie après il y à beaucoup de pays qui ont les deux yeux sur ce pays pour y exploiter les richesses qui se trouvent dans le sol , la Chine en premier.

En Corée du sud en Chine les blogueurs sont très surveillés et censurés voire très souvent emprisonné dans des camps de reconditionnement mental,nous en France on est jamais content mais bon je pense que l'on est un des pays au monde qui à le plus de liberté.

Je te souhaite une bonne fin de dimanche malgré le mauvais temps enfin ici lol , bises.